« On te prend, on t’use et puis on te jette comme un vieux torchon »

Corinne Sotiau, 46 ans, travaille comme aide familiale à Verviers depuis qu’elle a 18 ans. Un travail pénible qui comporte plusieurs risques. Malgré cela, Corinne aime son métier. C’est cet amour qui la pousse à lutter pour en améliorer les conditions. Rencontre avec la déléguée d’Horval.

Le métier d’aide familiale comporte des risques physiques et psychosociaux. Quand on commence à travailler, on est en bonne santé. Hélas, une bonne partie d’entre nous finissent par être inaptes au travail. On te prend, on t’use et puis on te jette comme un vieux torchon et ce, sans aucune indemnité. Il y a aussi les risques psychosociaux, tout ce qui touche à la personne et à son état psychologique. Peu de personnes se rendent compte du nombre de décès que l’on doit endurer sur une carrière. On s’attache aux personnes et puis soudainement, elles ne sont plus là. En outre il y a aussi le fait de s’occuper de personnes psychiquement instables et les changements de situations ; dans la même journée on peut aller chez quelqu’un qui vient de donner la vie, puis se rendre ensuite chez quelqu’un qui va mourir.

Est-ce que tu as déjà eu des soucis de santé liés au travail ?

Cela fait 27 ans que je travaille comme aide familiale, des problèmes de santé j’en ai eu : problèmes aux genoux, au dos, déprime... Un membre de la direction m’avait dit : « tu aimes beaucoup ton travail, mais il ne t’aime plus. » J’ai dû me faire opérer et suivre l’école du dos, où on te réapprend à éviter tous les gestes dangereux pour ton dos. Mais mon dos est tordu, c’est quelque chose qui va me rester. J’ai également eu un accident de voiture lié au stress des petites prestations. Il faut parfois faire jusqu’à sept prestations par jour.

Que faire pour améliorer la situation ?

Tout d’abord, la reconnaissance, tant au niveau de l’entreprise qu’au niveau du secteur. Il faut revaloriser le métier pour attirer les jeunes et le pérenniser. Un aménagement du temps de travail serait également nécessaire. Enfin, une meilleure intervention financière. Certaines collègues doivent aller chez le psychologue et cela n’est pas remboursé par le patron. Il nous est suggéré de faire des loisirs pour prendre du recul et lâcher prise, mais toutes les travailleur·euse·s n’en ont pas les moyens. De plus un.e aide familial.e doit disposer d’un véhicule : il faut payer l’assurance, les pneus neige, l’entretien, etc., mais elle a un salaire minimum très maigre. C’est très compliqué.

Pourquoi aimes-tu ce métier ?

Le contact avec les gens : ce qu’on leur apporte, le retour qu’ils nous font. Quand tu quittes quelqu’un et qu’il a le sourire jusqu’aux oreilles parce qu’il n’a vu que toi sur toute sa journée, ça vaut tout l’or du monde.

En vue des élections sociales, quel message passerais-tu aux travailleur·euse·s qui iront voter ?

On n’a peut-être pas encore gagné de grandes batailles, mais on a obtenu des choses qui ont changé nos conditions de travail de manière considérable, grâce à votre soutien. Le chemin est encore long. Votez pour soutenir notre lutte !