Le syndicat équatorien du secteur bananier fait un tour de lobbying à Bruxelles

Du 5 au 8 juin, FOS a accueilli à Bruxelles une délégation d’ASTAC, un syndicat du secteur bananier en Equateur. Elle s’est rendue en Belgique pour rencontrer des responsables politiques belges et de l’Union européenne, des syndicats et des ONG. L’objectif était clair : demander une attention particulière aux conditions de travail inacceptables dans le secteur bananier et obtenir du soutien et des engagements concrets à différents niveaux. Ensuite, la délégation syndicale poursuivra sa mission en Autriche, en Pologne et en Allemagne.

Jorge Acosta de l’ASTAC témoigne sur les conséquences de pesticides pour la santé des travailleurs.

Des bananes bon marché à un prix élevé
Depuis 1944, l’Equateur est le plus grand exportateur de bananes au monde entier. Le secteur bananier met près de 90.000 travailleurs au travail. Le salaire minimum équatorien s’élève à $ 366 USD, mais une grande partie des ouvriers bananiers gagne moins. Beaucoup d’entre eux travaillent dans l’informalité, sans contrat et sans aucune forme de protection sociale. Souvent, ils sont payés en fonction des prestations et ils sont obligés d’atteindre un certain rendement. Souvent, les travailleurs ne voient pas d’autre moyen que de faire appel à leurs enfants mineurs afin d’être capables d’atteindre ce rendement. En 2010, le ‘Rapporteur spécial des Nations unies des formes contemporaines d’esclavage’ a confirmé qu’il est question d’esclavage moderne dans le secteur bananier et palmier équatorien.

Entre-temps, nous sommes fin 2016 et la situation a à peine changée, bien au contraire. Les conditions de travail dans les plantations sont connues et pourtant, nous continuons tous à importer et à consommer des bananes bon marché de l’Equateur. Les pays européens sont les plus gros acheteurs de bananes équatoriennes. La Belgique achète 5% de l’exportation totale destinée à l’Europe, est le deuxième plus grand importateur et le sixième exportateur bananier au niveau mondial. Le port d’Anvers traite la plus grosse quantité de bananes au monde. Selon le syndicat ASTAC, il était donc grand temps de visiter et de conscientiser quelques pays européens.
Le travail syndical dans le secteur bananier

L’ASTAC est un syndicat indépendant qui veut s’organiser au niveau sectoriel, non seulement afin de représenter les travailleurs actifs dans les grandes plantations, mais également ceux qui travaillent dans des entreprises plus petites où il n’y a pas de syndicat. Les défis sont énormes. A part les conditions de travail extrêmement difficiles, le travail syndical se tolère à peine dans le secteur bananier. Les travailleurs sont poursuivis lorsqu’ils essaient de s’organiser dans un syndicat et il circule des listes noires reprenant les noms des membres syndicaux. Les entreprises ont un pouvoir énorme et ils ont de fortes liaisons avec le monde politique. De plus, récemment il y a eu un séisme en Equateur touchant bon nombre des membres syndicaux, ce qui met encore une pression supplémentaire sur la lutte sociale.
L’ASTAC attend depuis plusieurs années d’être reconnu officiellement en tant que syndicat, mais les pouvoirs publics continuent à refuser cette reconnaissance. Dès lors, l’ASTAC a porté plainte auprès de l’OIT (Organisation Internationale du Travail) en raison du non-respect de la convention 087, stipulant que les travailleurs doivent être libres de s’organiser, entre autres dans des syndicats. L’Equateur a ratifié cette convention et doit, par conséquent, garantir ce droit.
L’ASTAC cherche du soutien en Europe 

Pendant son tour de lobbying en Europe, l’ASTAC souligne la lutte mondiale. « La UE a besoin de produits bon marché, comme des bananes ou des vêtements », dit Jorge Acosta de l’ASTAC. « Ainsi, elle peut procéder à une détérioration sociale et à des économies sans qu’il y ait beaucoup de troubles ou de plaintes. Ici, des intérêts politiques et économiques entrent en jeu, au détriment de tous les travailleurs et les citoyens, en Equateur et dans l’UE. Voilà pourquoi notre lutte est également la vôtre. »

A Bruxelles, des réunions ont eu lieu avec 11.11.11, Fair Trade Belgium, Fair Trade Advocacy Office, Solidar, Corporate Europe Observatory, Horval-FGTB, FGTB Flandre occidentale, le parlementaire du sp.a Dirk Vandermaelen et des collaborateurs du parlementaire européen Ignazio Corrao. En effet, beaucoup de choses doivent être faites, c’est clair. Ainsi, il faut davantage de pression internationale sur les autorités équatoriennes afin de faire respecter la législation du travail nationale et internationale, dans le cadre de la convention commerciale avec l’UE et le travail politique au niveau belge et européen doit assurer que l’accord commercial entre l’UE et l’Equateur reprenne de meilleures garanties au niveau des droits syndicaux et du travail.

De plus, l’ASTAC espère que les initiatives comme Fair Trade conscientisent les consommateurs de l’intérêt du commerce équitable. Les investissements dans l’agriculture à petite échelle plutôt que dans l’agriculture des plantations sont une condition importante afin de garantir un travail décent. Cela doit former la base d’une politique commerciale décente. Finalement, les syndicats doivent insister auprès de l’Organisation Internationale du Travail pour que l’Equateur garantisse le respect des conventions, comme celle de la liberté syndicale.

Auteur: Karolien Debel